Pour bien appréhender les évolutions de l'emploi, il faut comprendre que ces évolutions résultent de la différence entre les emplois qui se créent, et des emplois qui sont détruits : alors que le nombre d'emplois crées une année donnée est – les meilleurs années - de l'ordre de 400.000, le nombre d'emplois crées ou détruits est plus proche de 2 à 3 millions.
On pourrait être tenté d'en déduire que la lutte contre le chômage passe par une accélération des créations (par des aides, des emplois aidés dans le secteur public, la commande publique ou des allégements de charges ou de réglementation), un ralentissement des destructions (par des aides aux entreprises, ou des hausses du coût ou des contraintes juridiques) ou une baisse de la population active (en accélérant les départs en retraite ou en jouant sur les emplois aidés).
On peut également voir les choses autrement, en partant du double rôle de l'emploi :
- un rôle social - l'emploi définit en grande partie la place donnée à chacun dans la société, et l'absence d'emploi renvoie souvent aux chômeurs ce message angoissant : il n'y a pas de place pour eux – souvent sans en préciser les raisons, ni indiquer aux demandeurs d'emploi ce qu'ils pourraient faire pour trouver une telle place ;
- un rôle économique – les emplois font partie de processus productifs, et plus ces processus sont créateurs de valeur, plus l'emploi est protégé et susceptible d'être rémunéré ;
Cette double analyse mène à une politique de l'emploi bien différente du « filet garni » habituel, comprenant emplois aidés, aides aux entreprises, modifications des textes et mesures de retraite d'activité qui a inspiré plusieurs « plans pour l'emploi », dont le plus récent d'entre eux.
Pour remplir au mieux le rôle social, il faut revoir en profondeur le dispositif public d'aide à l'emploi pour le centrer sur une mission : trouver l'emploi qui réalise pour chaque demandeur d'emploi le meilleur compromis entre ses aspirations, ses capacités et ce que peut lui offrir le marché. On trouvera sur le site www.supprimerlechomage.org un détail de ce que cela implique – on y retrouve des outils existants, mais ils sont articulés d'une façon différente du l'accumulation de dispositifs qui caractérise actuellement notre système d'aide à l'emploi.
Pour remplir au mieux le rôle économique, il faut organiser l'économie de façon à faciliter la réponse aux besoins, et l'adaptation aux technologies. On trouvera dans une émission récente de France Culture un débat approfondi sur le second point ( ). S'agissant de l'adaptation aux besoins, il faut, là aussi, repenser les formalités de création d'activité pour faciliter la transformation d'une idée en activité. La piste souvent privilégiée est celle de la baisse de charge, en créant des exceptions dans notre système fiscal ou social – c'est-à-dire en condamnant les entreprises ainsi créées à se fonder sur un modèle non soutenable au-delà d'une certaine taille. Une option différente pourrait être la suivante :
- les formalités liées aux feuilles de paye et à la constitution du dossier de création seraient intégralement prises en charge par l'Etat, gratuitement pour les premières, et pour un coût symbolique (150 euros) pour les secondes. Cette « internalisation » du coût des procédures pousserait ainsi l'administration à supporter le coût de la complexité de ses processus. L'Etat serait alors bien plus incité à réduire ou à numériser ses processus, puisqu'elle bénéficierait des économies ainsi induites ;
- les charges (notamment sociales) liées à une activité d'un niveau inférieur à un certain seuil (la moitie du SMIC par exemple) seraient prélevées sous la forme d'une contribution sur le chiffre d'affaires – contrairement à la situation actuelle dans laquelle la protection sociale présente une caractère en grande partie forfaitaire pour les petites entreprises, alors qu'elle est « offert » aux demandeurs d'emploi.
Ainsi, point n'est besoin d'opposer les salariés aux entreprises pour réduire le chômage : avec le premier dispositif, tout chômeur disposerait des moyens pour trouver une place dans le monde du travail. Avec le second, tout porteur de projet - étudiant, salarié, chômeur ou retraité - pourrait créer de façon simple une activité.
lundi, août 28, 2006
mercredi, août 09, 2006
Innovation et recherche : parlons-en !
"To invent, you need a good imagination and a pile of junk." - Thomas Edison
Savez-vous comment est né le World Wide Web ? Pas des laboratoires de recherche militaire américains (ils ont plutôt développé le précurseur du réseau Internet, qui permet à un ensemble d’ordinateurs de se connecter pour créer un réseau). Pas des startups californiennes (elles ont essentiellement développé des applications une fois le web lancé). Pas des géants de l’informatique (même si Xerox avait eu des initiatives intéressantes, leur apport s’est essentiellement concentré dans le développement d’ordinateurs personnels bon marché). Pas des plans d’investissements publics centrés sur les réseaux (ils se sont essentiellement concentré sur les réseaux universitaires et militaires).
Non, le web est né d’une initiative d’un contractuel d’un laboratoire de recherche européen (le Cern), qu’un contrôle de gestion rigoureux aurait freinée, si ce n’est empêchée : dans un laboratoire censé consacré ses moyens à la recherche nucléaire, Tim Berners-Lee réussit en effet à faire financer un projet consacré à un projet consacré à un nouveau langage hypertexte (http://fr.wikipedia.org/wiki/Tim_Berners-Lee). Pour schématiser à l’extrême : l’une des évolutions les plus importantes pour la diffusion de la connaissance, l’innovation ou le travail en groupe est née du fait que des chercheurs ont pu, sur leur temps de travail, gaspiller de l’argent (par rapport aux missions de leur contrat de travail) avec l’aide de consultants extérieurs !
Beaucoup des grandes découvertes ont des origines comparables. Ainsi la théorie de la relativité est-elle due à Albert E, obscur employé de l’office des brevets de Berne, refusé par toutes les universités auxquelles il avait postulé. La découverte de la pénicilline est liée à une erreur de laboratoire, un expérience sur le développement de moisissures ayant contaminé par inadvertance une expérience sur des souches bactériennes. La radioactivité a également été découverte par hasard (http://fr.wikipedia.org/wiki/Antoine_Henri_Becquerel). Et les exemples ne sont pas limités à la recherche théorique ou fondamentale : l’invention du Post-It (http://fr.wikipedia.org/wiki/Post-it) relève le même logique. De la même façon l’un des centres de recherche les plus prolifique de l’histoire récente, Xerox Parc (http://en.wikipedia.org/wiki/Xerox_PARC), responsable entre autre de l’imprimante laser, des systèmes d’interface avec souris, fenêtres et menus, du langage orienté objet voir du langage html a-t-il également été un échec financier pour son financeur.
La société 3M, reconnue pour sa capacité d’innovation(http://management.journaldunet.com/dossiers/040640innovation/3m.shtml), a poussé se système jusqu’au bout en définissant sa politique d’innovation comme suit : mettre des moyens importants, favoriser l’échange et le maillage entre des équipes différentes, laisser les chercheurs consacrer 15 % de leur temps à leurs recherches personnelles, et favoriser et valoriser les carrières d’experts plutôt que de vouloir transformer d’excellents chercheurs en mauvais gestionnaires.
Bien sur, une nation ne se gère pas comme une entreprise : un état se doit par exemple d’être plus généreux sur les moyens (car il doit inclure le rendement public comme le rendement privé des innovations), moins élitiste (car il doit répondre à une base plus large que le cercle des actionnaires d’une entreprise). Il doit aussi concevoir un cadre plus large, qui permette à de former des étudiants et des chercheurs, de faire avancer la recherche publique, tout en stimulant la recherche privée et en libérant l’innovation.
Or ces trois répondent à des contraintes différentes. Ainsi, le processus de validation des publications scientifiques (http://bsalanie.blogs.com/economie_sans_tabou/2006/02/la_rpublique_de.html) fonctionne-t-il d’une façon qui favorise les innovation incrémentales de chercheurs « connus », et qui élimine les innovations radicales et freine les contributions de chercheurs moins connus. Ainsi les innovations les plus profondes sont-elles l’ennemi d’un contrôle de gestion borné et d’une mécanique administrative et centralisée ou élitiste.
Cela ne signifie évidemment pas qu’il faille renoncer à toute politique. Par exemple en orientant davantage la formation vers la créativité, l’expérimentation et le travail en groupe qu’en en faisant un outil grotesque de sélection et de reproduction d’exercices scolaires. Par exemple en décentralisant et en réduisant le poids du mandarinat dans l’université et la recherche. Par exemple en favorisant les échanges et les confrontations entre le monde la recherche, de l’éducation ou de l’entreprise. Et surtout en évitant de se limiter au seul point de vue des grands groupes, des startups, des chercheurs, des professeurs ou innovateurs – mais en construisant un système que tienne compte de l’ensemble de leurs contraintes.
Bref une politique dans laquelle il ne suffit pas de donner plus à tous ou rien à personne, mais où il faut surtout faire des choix et jouer à la fois sur les moyens et sur les structures. C’est un chantier à moyen terme, malheureusement difficile à résumer dans un slogan électoral : pour 2007, reste donc à choisir celui où celle qui semblera présenter – individuellement ou dans un « ticket » avec d’autres personnalités - les meilleures prédisposition à analyser puis gérer ce sujet avec recul, méthode et intelligence.
Savez-vous comment est né le World Wide Web ? Pas des laboratoires de recherche militaire américains (ils ont plutôt développé le précurseur du réseau Internet, qui permet à un ensemble d’ordinateurs de se connecter pour créer un réseau). Pas des startups californiennes (elles ont essentiellement développé des applications une fois le web lancé). Pas des géants de l’informatique (même si Xerox avait eu des initiatives intéressantes, leur apport s’est essentiellement concentré dans le développement d’ordinateurs personnels bon marché). Pas des plans d’investissements publics centrés sur les réseaux (ils se sont essentiellement concentré sur les réseaux universitaires et militaires).
Non, le web est né d’une initiative d’un contractuel d’un laboratoire de recherche européen (le Cern), qu’un contrôle de gestion rigoureux aurait freinée, si ce n’est empêchée : dans un laboratoire censé consacré ses moyens à la recherche nucléaire, Tim Berners-Lee réussit en effet à faire financer un projet consacré à un projet consacré à un nouveau langage hypertexte (http://fr.wikipedia.org/wiki/Tim_Berners-Lee). Pour schématiser à l’extrême : l’une des évolutions les plus importantes pour la diffusion de la connaissance, l’innovation ou le travail en groupe est née du fait que des chercheurs ont pu, sur leur temps de travail, gaspiller de l’argent (par rapport aux missions de leur contrat de travail) avec l’aide de consultants extérieurs !
Beaucoup des grandes découvertes ont des origines comparables. Ainsi la théorie de la relativité est-elle due à Albert E, obscur employé de l’office des brevets de Berne, refusé par toutes les universités auxquelles il avait postulé. La découverte de la pénicilline est liée à une erreur de laboratoire, un expérience sur le développement de moisissures ayant contaminé par inadvertance une expérience sur des souches bactériennes. La radioactivité a également été découverte par hasard (http://fr.wikipedia.org/wiki/Antoine_Henri_Becquerel). Et les exemples ne sont pas limités à la recherche théorique ou fondamentale : l’invention du Post-It (http://fr.wikipedia.org/wiki/Post-it) relève le même logique. De la même façon l’un des centres de recherche les plus prolifique de l’histoire récente, Xerox Parc (http://en.wikipedia.org/wiki/Xerox_PARC), responsable entre autre de l’imprimante laser, des systèmes d’interface avec souris, fenêtres et menus, du langage orienté objet voir du langage html a-t-il également été un échec financier pour son financeur.
La société 3M, reconnue pour sa capacité d’innovation(http://management.journaldunet.com/dossiers/040640innovation/3m.shtml), a poussé se système jusqu’au bout en définissant sa politique d’innovation comme suit : mettre des moyens importants, favoriser l’échange et le maillage entre des équipes différentes, laisser les chercheurs consacrer 15 % de leur temps à leurs recherches personnelles, et favoriser et valoriser les carrières d’experts plutôt que de vouloir transformer d’excellents chercheurs en mauvais gestionnaires.
Bien sur, une nation ne se gère pas comme une entreprise : un état se doit par exemple d’être plus généreux sur les moyens (car il doit inclure le rendement public comme le rendement privé des innovations), moins élitiste (car il doit répondre à une base plus large que le cercle des actionnaires d’une entreprise). Il doit aussi concevoir un cadre plus large, qui permette à de former des étudiants et des chercheurs, de faire avancer la recherche publique, tout en stimulant la recherche privée et en libérant l’innovation.
Or ces trois répondent à des contraintes différentes. Ainsi, le processus de validation des publications scientifiques (http://bsalanie.blogs.com/economie_sans_tabou/2006/02/la_rpublique_de.html) fonctionne-t-il d’une façon qui favorise les innovation incrémentales de chercheurs « connus », et qui élimine les innovations radicales et freine les contributions de chercheurs moins connus. Ainsi les innovations les plus profondes sont-elles l’ennemi d’un contrôle de gestion borné et d’une mécanique administrative et centralisée ou élitiste.
Cela ne signifie évidemment pas qu’il faille renoncer à toute politique. Par exemple en orientant davantage la formation vers la créativité, l’expérimentation et le travail en groupe qu’en en faisant un outil grotesque de sélection et de reproduction d’exercices scolaires. Par exemple en décentralisant et en réduisant le poids du mandarinat dans l’université et la recherche. Par exemple en favorisant les échanges et les confrontations entre le monde la recherche, de l’éducation ou de l’entreprise. Et surtout en évitant de se limiter au seul point de vue des grands groupes, des startups, des chercheurs, des professeurs ou innovateurs – mais en construisant un système que tienne compte de l’ensemble de leurs contraintes.
Bref une politique dans laquelle il ne suffit pas de donner plus à tous ou rien à personne, mais où il faut surtout faire des choix et jouer à la fois sur les moyens et sur les structures. C’est un chantier à moyen terme, malheureusement difficile à résumer dans un slogan électoral : pour 2007, reste donc à choisir celui où celle qui semblera présenter – individuellement ou dans un « ticket » avec d’autres personnalités - les meilleures prédisposition à analyser puis gérer ce sujet avec recul, méthode et intelligence.
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